lundi 5 juin 2023

Critique du dernier livre de E. Zemmour

J'ai terminé il y a plusieurs semaines le dernier livre d'Eric Zemmour et mon avis est un peu mitigé : excellent sur la forme (comme d'habitude), très bon sur le fond (l'analyse est juste) ... Mais pas forcément judicieux sur le plan stratégique. 

Chassez le naturel et il revient au galop : la plume reprend possession du corps de Zemmour.

Toute personne qui suit l'actualité comme je le fais, qui s'intéresse aux problèmes que rencontre notre pays et qui n'est pas trop sectaire reconnaitra que l'analyse de Zemmour est juste sur de nombreux points. 

Dans ce livre, Zemmour "refait le match" : il s'attarde sur la genèse de son mouvement, génération Reconquête!  Pour ceux comme moi qui ont suivi l'aventure du polémiste, c'est évidemment très intéressant. L'intérêt du lecteur en particulier est porté sur l'élément déclencheur de sa candidature à la présidentielle de 2022. Un chapitre entier y est consacré : Eric Zemmour explique simplement qu'il n'y a pas eu un élément unique, mais une succession de petits événements (la décision du CSA, le départ forcé du Figaro,...) qui l'ont conduit vers ce choix.

L'auteur consacre aussi un chapitre sur l'incroyable surprise que constitue pour lui Génération Z : des jeunes qui l'ont écouté lorsqu'il était chroniqueur sur l'émission "On n'est pas couché" présentée par Laurent Ruquier et qui se sont reconnus dans ses idées. Ces jeunes, pilotés notamment par Stanislas Rigault ont donné une impulsion décisive, notamment en collant des affiches de manière sauvage quand l'idée de sa candidature n'était qu'un fantasme. 

La tournée littéraire consécutive à la sortie de son dernier essai "La France n'a pas dit son dernier mot" et les rencontres avec les français dont certains lui criaient "Sauvez-nous !"  a fait le reste.

Zemmour revient bien sûr sur la presse "people" et notamment l'article racoleur consacré à Eric Zemmour et Sarah Knafo par Paris Match, et que Libération accusera Zemmour de l'avoir planifié, tant il est vrai qu'il n'a pas diminué sa popularité, bien au contraire. 

Le débat avec Melenchon sur BFM TV fin Septembre 2021 (que j'avais suivi) est celui qui lui donne une légitimité certaine sur le plan politique, alors qu'il n'est toujours pas candidat. 

Le mois d'Octobre est celui où tout bascule : Zemmour prend pratiquement un point par jour, à la stupéfaction des journalistes. Je pense d'ailleurs que sa situation d'ancien journaliste a du générer des jalousies extrêmes au sein de toute la profession. Il me semble qu'on sous-estime l'envie au sein de cette profession de cloportes (quand je pense que je voulais être grand reporter dans ma jeunesse 😔)

L'un des reproches qui a souvent été fait au candidat Zemmour, c'est que, parlant peu d'économie, il semblait avoir relégué ce sujet brûlant en troisième division. Moi qui suis très intéressé par le sujet, je peux vous affirmer que ce n'est pas vrai.
Je ne pourrais être plus en accord avec cette phrase tirée du livre : "le mal français est à l'inverse des procès idéologiques habituels : l'économie française est à la fois trop libérale et trop socialiste. Trop libérale parce que le marché français est l'un des plus perméables au monde. Trop socialiste aussi, lorsque la France accable ses entreprises d'impôts, de charges sociales et de normes sanitaires ou écologiques qu'une bureaucratie tatillonne fait appliquer avec une rigueur unique en Europe". 

L'article tonitruant de BHL dans le Point à charge contre Zemmour, dans lequel il présente ce dernier comme une "offense au nom juif, un traitre à ses ancêtres, à ses racines"... ne m'étonne pas du tout venant de ce personnage.  
Comme Zemmour, j'accuse BHL d'être un traître mais à la nation française. Quel malheur que cette crapule n'ait pas été démasqué plus directement par les français ! Je dirais que ce type est l'un des 20 responsables (avec Jacques Attali, Mitterrand, Chirac,...) de la situation désastreuse de notre beau pays.  

L'auteur s'attarde sur la situation spécifique de la bourgoisie patriote et lance quelques épines bien méritées à Robert Ménard qu'il appelle "mon Judas de Béziers" tandis qu'il encense Philippe de Villiers (le chevalier). Il évoque longuement ceux qui "ont préféré leur pays à leur parti" ( Guillaume Peletier, Nicolas Bay, Marion Maréchal,...)

Le livre consacre un chapitre entier aux Républicains (LR) écartelés entre Reconquête et macronisme. Pour moi, comme pour Zemmour, ce parti est mort, au moins tant qu'il n'a pas fait un choix clair. Du reste, quelles personnalités y subsistent encore, à l'exception peut-être de François-Xavier Bellamy ?

Il démolit consciencieusement, mais sans s'y attarder, vu que le travail est déjà fait, Valérie Pécresse, la dame du "faire". 

Il consacre aussi, et c'est essentiel un chapitre entier au déni absolu de démocratie décidé unilatéralement par Fabius en tant que président du Conseil Constitutionnel. C'est un épisode qui m'avait échappé. 
Mettez cela en parallèle avec l'augmentation scandaleuse des rémunérations des membres du Conseil Constitutionnel dévoilée en 2021 par Challenges, et vous comprenez une partie de ma colère.

Enfin, le livre aborde la chute dans les sondages que Zemmour appelle "La Retraite de Russie" dans un parallèle presque amusant avec Napoléon et surtout la raison qui a provoqué sa chute soudaine, à savoir l'attaque de l'Ukraine par la Russie. C'est à compter de ce moment-là que les personnes âgées ont commencé à prendre peur et à se resserrer par réflexe, autour du président élu, lequel n'a eu qu'à se baisser pour ramasser les voix. De fait, la campagne d'Emmanuel Macron sera réduite au minimum syndical. 

La suite est connue... L'effritement des sondages pour Zemmour pousse ceux qui ne veulent surtout pas de Macron à se rallier autour de celle qu'ils perçoivent comme sa principale adversaire. 

Et puis Zemmour lui-même n'est pas exempt de fautes bien sûr : le concept de remigration, associé dans l'esprit des gens aux idées du groupe Identitaire, le doigt d'honneur à Marseille,... 
Il y consacre un chapitre intitulé sobrement "Mea Culpa" dans lequel il met en avant ses erreurs. Il est toujours facile, après coup, de critiquer. Retenons simplement la phrase de Michel Platini : "le jeu appelle la faute. S'il n'y avait pas de fautes, il n'y aurait jamais de buts". 


Au global, le vrai problème de cet ouvrage est que seul les personnes déjà convaincues de la justesse des idées de Zemmour sont susceptibles de le lire. Je n'imagine pas un seul adversaire idéologique accepter d'ouvrir le livre. 

En clair, pour ce qui est de faire progresser la bataille des idées, c'est clairement un coup dans l'eau.

Le titre lui-même, clin d'oeil à son précédent ouvrage, sonne un peu péremptoire par rapport aux résultats très mauvais aussi bien à la présidentielle qu'aux législatives. 

Dans ces conditions, comment faire pour réveiller les consciences, pour faire prendre au peuple la mesure de l'enjeu civilisationnel qui se trouve devant nous, comme ne cesse de le clamer Eric Zemmour et son parti Reconquête ? 

Honnêtement, je ne pense pas, je ne pense plus, qu'une telle action soit encore possible. 

Michel Onfray est également de cet avis : il a entrevu notre futur, comme d'autres, par exemple cet article sur le blog de Covidemence

Ce futur est encore plus flagrant lorsqu'on le relie à des sondages tels que celui-ci

Lorsqu'on est un observateur attentif de la vie politique, lorsqu'on constate le fiasco absolu de ce gouvernement (notamment dans sa gestion du Covid,...) on sait que tout est déjà acté. 

Essayons simplement de vivre en harmonie avec la situation qui nous est donnée. 

Ce qui ne m'empêchera pas de rendre hommage à la justesse de l'analyse d'Eric Zemmour. 


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

L'excellente surprise Sarah Knafo !

 Je démarre cette année 2025 avec un article dédiée à Sarah Knafo, l'excellente surprise de cette année 2024 qui s'est pourtant révé...